Le bal du Muguet [All]

Une fois sur le balcon, seule, Emrys inspira de grandes goulées d'air frais, l'aidant à se calmer. Son imagination lui jouait probablement des tours, mais cette succession de coïncidences lui avait réellement fait tourner la tête. Elle était cependant toujours un peu mal à l'aise par rapport à Shäan et Zei, et ne manquerait d'éclaircir la situation avec son cavalier. Des pas s'approchèrent doucement de la jeune femme, et à sa grande surprise - autant qu'à son contentement - Elle vit Koniake la rejoindre avec un verre de champagne. Le rouge monta aux joues de la blanche, alors qu'elle répondait au sourire du barde.

"Merci ! Je suis désolée pour ma fuite soudaine... Je n'ai pas l'habitude de ce genre de soirée, et je ne m'attendais pas à y retrouver toutes mes récentes connaissances en même temps ! La coïncidence m'a donné le tournis..."

La demoiselle porta la coupe à ses lèvres pour boire une gorgée, appréciant la sensation des bulles dans sa bouche. Elle s'avança vers le balcon pour se rapprocher du jeune homme et posa sa main libre contre la rambarde, perdant son regard dans le paysage étoilé, un léger sourire aux lèvres.

"Le plaisir est partagé... Il est vrai que j'ai déjà parcouru un bout de chemin depuis notre dernière rencontre ! L'idée de voyager n'a rien perdu de sa saveur, même s'il m'est arrivé quelques péripéties ! Qu'en est-il pour vous ? Qui est cet enfant qui voyage avec vous... Elliott, c'est bien ça ?"

Même si Emrys était rassurée qu'il ne s'agisse pas de l'enfant de Zei, elle était tout de même curieuse de savoir ce qu'il en était. Koniake était trop jeune pour être son père... Peut-être son tuteur ? Son frère ? Lors de leur dernière rencontre, les deux n'avaient pas vraiment abordé le sujet de la famille. Le barde mentionna alors soudain un triton chanteur se produisant à l'intérieur... Se pourrait-il que ?

"Un triton avez-vous dit ? Serait-ce Leukos par le plus grand des hasards ?! Si c'est le cas, je l'ai déjà entendu chanter, et vous êtes tout aussi talentueux !"

Ou peut-être la blanche était-elle biaisée par ses sentiments pour le jeune homme et le voyait plus talentueux qu'il n'était vraiment ? Elle se tenait juste à côté de lui et pouvait sentir sa chaleur si proche d'elle. Il lui suffirait d'étendre un tout petit peu le bras pour que leurs mains se frôlent, mais la Styrge n'osa franchir les derniers centimètres et décida de changer de sujet pour cacher son trouble. Elle ne savait pas quel genre de relation ils entretenaient tous les deux, malgré leurs échanges enflammés dans la nuit Sablienne.

"Je suppose que nous devrions rentrer ? J'aimerais saluer Leukos, et je ne voudrais pas inquiéter ce cher Karl par mon absence !"

Enroulant son bras autour de celui du barde, Emrys l'entraîna avec elle à l'intérieur, laissant son verre vide sur le rebord du balcon. Ils traversèrent le hall principal, où des invités retardataires arrivaient encore, avant de rejoindre la salle de réception. La demoiselle desserra son étreinte autour du bras de Koniake, et ralentit le pas pour regarder autour d'elle, à la recherche de son cavalier et de leurs amis. Alors qu'elle se retournait un peu trop vivement, elle bouscula par mégarde une jeune femme aux cheveux d'une couleur aussi étincelante qu'inhabituelle.

"Oh ! Je suis vraiment désolée, quelle étourdie je fais ! Je ne vous ai pas fait mal ?"

La blanche doutait de l'avoir blessée, mais elle s'inquiétait plus d'avoir froissé sa belle robe dorée, ou pire, de l'avoir fait renverser son verre dessus. Mais fort heureusement, elle ne semblait rien avoir entre les mains. Peut-être venait-elle juste d'arriver ?

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A en croire certaines réactions dans l'audience, Leukos n'avait finalement pas si mal choisi son morceau, et il accueillit les applaudissements bruyants avec un profond soulagement. Il eut même la surprise de voir une pièce rebondir mollement sur son torse avant de s'écraser au sol, une coutume qu'il avait déjà aperçu à la surface et qu'il trouvait pour le moins étrange. Les gens ne savaient-ils pas qu'un artiste était payé pour se produire ? Il ne se pencha pas moins pour récupérer l'offrande, un sourire à s'en décrocher la mâchoire habitant son visage, et lança un "merci" des plus chaleureux à l'assemblée avant de se préparer à reprendre le concert.

Malheureusement, le triton n'eut pas le temps d'enchaîner qu'un homme en costume impeccable se porta à sa hauteur et s'accrocha à son bras en lui murmurant quelques mots. Ce dernier, tout en le tirant lentement mais fermement loin du devant de la scène, lui expliqua que plusieurs plaintes concernant son répertoire étaient parvenues à l'organisation, qu'il valait mieux s'arrêter là, et que dans la mesure où il n'avait assuré qu'une chanson sur les quatre prévues, il serait rémunéré en conséquence. Leukos repensa alors à la chambre réservée plus tôt dans un hôtel luxueux de Cirdania, à la monture louée à grands frais pour découvrir la région, et à tous les autres frais qu'il avait promis de rembourser le soir même.

Ses jambes faillirent le lâcher, et il ne trouva pas la force de défendre son cas sur le moment. Tout ce qu'il savait, c'était qu'au lieu de pouvoir enfin profiter du faste qui lui avait toujours échappé, il se retrouvait encore plus pauvre qu'à l'accoutumée. S'il trouvait celui ou celle qui lui avait balancé l'écu, il ne manquerait pas de lui montrer sa gratitude car ce don prenait une importance capitale. Complètement désabusé, le chanteur se décida à traverser la grande salle pour aller prendre de l'air. Il ne vit pas le bretteur borgne en passant à côté de la scène, ou du moins fit semblant de ne pas le voir, trop préoccupé par les quelques regards lourds de reproches qu'on lui lançait en chemin.

Déjà qu'il s'était mis le public à dos, il serait peut-être en plus recherché dès le lendemain en tant que mauvais payeur. Et s'il ne pouvait jamais revenir dans le coin ? En se frayant un chemin dans la foule il sentait ses pattes flageolantes sur le point de le trahir, et il aurait donné tout son argent - mauvais exemple – pour être seul au milieu de la mer en cet instant. Enfin il aperçut un visage amical lorsqu'il atteignit l'entrée de la salle, en la personne de Shäan, mais celle-ci semblait plus prompte à faire des leçons de morale pour le moment qu'à offrir des critiques positives et rassurantes sur une adaptation musicale.

- "De l'eau, il me faut de l'eau..."

Il n'arriverait plus à supporter ses jambes biens longtemps, il fallait qu'il se transforme, et vite. Il passa le plus discrètement possible derrière le duo mal appairé, et passa dans le hall où se trouvaient encore quelques retardataires, ainsi que...

- "Oui !"

Un long soupir de soulagement s'échappa de ses lèvres en remarquant une fontaine quelques mètres plus loin, dire qu'il avait failli envisager les toilettes pour sa remise en forme. Bénis soient les humains d'avoir pensé à un dispositif de rafraîchissement des peuples aquatiques. Bien qu'un peu étroit pour accueillir plusieurs sirènes en même temps, l'effort était à noter, et le triton s'engagea vers l'eau salvatrice avant de se stopper net en entendant une exclamation sur sa droite. Ces deux-là, accompagnés par une créature dont il ne pouvait ignorer la prestance, il les connaissaient. Que faisaient Emrys et le malotru tireur de nudistes ici ? Pire encore, si la jeune femme avait entendu sa performance, nul doute qu'elle ne l'avait pas trouvée à son goût et la gêne gagna Leukos aussi vite qu'une courante dans une fête foraine.

Trop d'émotions se bousculaient en lui, et chacune d'elle le tirait vers le fond au point qu'il voulait seulement disparaître. Par chance il le pouvait, et à peine arrivé à hauteur du point d'eau il se laissa tomber dedans, un "plouf" pathétique accompagnant sa chute. Il resta là sans bouger, les bras en croix et sa queue de poisson retrouvée remuant mollement à la surface. Personne ne le verrait, personne ne ferait attention à lui le temps qu'il reprenne ses esprits, et c'était très bien comme ça.

Koniake chassa d'une main les excuses d'Emrys sur sa fuite, avec un sourire bienveillant.

-Nul besoin de vous excuser, ce genre d'ambiance est assez pesante. Ces riches sédentaires ne peuvent s'empêcher de nous voir comme des parias, ou, nous utiliser pour montrer jusqu'où s'étend leur gentillesse. Quoique, ce dernier cas n'est pas si mal.

Cela dit, malgré ce qu'il disait, il était le seul à avoir l'air d'être ce qu'il était. Emrys rayonnait dans sa somptueuse robe, ce qui obligeait le soigneur à ne jamais détacher son regard d'elle alors qu'elle observait le ciel. Il parvint néanmoins à regarder dans la même direction qu'elle en avalant un peu plus de la moitié de sa coupe quand elle lui parla de ses voyages et qu'elle le questionna sur les siens, puis sur l'enfant qu'il traînait avec lui.

-Oh, j'adorerais entendre les contes de vos péripéties ! Vous avez visiblement fait la connaissance du gratin des voyageurs d'Ezylone ! De mon côté, après notre rencontre à Ahriman, je suis rentré à Himabaha, dans l'espoir de me plonger dans l’étude d'antidote et chanson en tout genre ! Mais à peine rentré que le devoir m'a appelé ! Une attaque de Gahool a eu lieu à Port Dalian, et l'on est venu me trouver pour apporter des soins.

Son sourire avait progressivement disparu alors qu'il jetait un regard vers l'intérieur.

-C'est là-bas que m'a été confié, Eliott, par son père. C'est un garçon intelligent, qui n'a pas sa langue dans sa poche... Je ne vous dirais pas de quel surnom il m’affuble, mes lèvres ne sauraient proférer une insanité pareille !

Il s'était légèrement ragaillardi en prenant un air faussement choqué, avant d'avoir un éclat de rire en apprenant qu'elle connaissait Leukos.

-Décidément, nous avons vraiment croisé les mêmes personnes ! Votre compliment me va droit au cœur ! Être mis sur une octave d'égalité avec l’envoûtante voix du peuple de la mer ! C'est trop d'honneur !

La dame proposa de rentrer, et Koniake acquiesça tout en se laissant prendre par le bras, avec un sourire.

-Eh bien, je ne sais si je plains ce filou de Karl, d'avoir à mon bras sa cavalière, ou si je le jalouse, car elle est indéniablement la plus élégante demoiselle de ce bal !

Tout en flattant la jeune femme, il lui ouvrit la porte pour la laisser passer et fini d'un trait sa coupe pour la reposer sur un meuble. Le couple revint donc dans la salle du bal et Koniake fut surpris de ne plus voir Leukos sur la scène. Il eut une grimace, lui qui aurait tant aimé profiter de cette occasion pour mêler son luth à la voix du triton. Malheureusement, alors qu'il sentait le bras d'Emrys quitter le sien, et qu'il se tournait vers elle pour lui dire qu'il allait voir où Leukos se trouvait, celle-ci bouscula une autre dame.

Dame qui dégageait une aura des plus particulière. Néanmoins, le soigneur fut davantage préoccupé par Emrys, il tendit un bras pour le poser sur l'épaule de la blanche pour l'aider à retrouver l'équilibre – quand bien même elle le faisait très bien seul – avant de retirer sa main rapidement, pour ne pas l'embarrasser ou attirer des regards indiscrets. Le soigneur posa enfin son regard sur la dame à la chevelure émeraude et se para d'un sourire poli, en se glissant aux côtés d'Emrys, et effectua une légère révérence.

-N'en voulez pas à cette charmante demoiselle, je lui ai transmis ma panique en perdant de vue mon jeune protégé, elle tentait simplement de m'aider à le retrouver !

Et en parlant de jeune protégé, pendant que son supposé protecteur paradait auprès d'Emrys, quelques instants plus tôt, Eliott avait bombé le torse pour faire le gros dur quand Zeï avait parlé des insanités de la chanson.

-C'est bon ! J'ai entendu pire avec les pirates, pis, on peut pas dire que Konnard me traîne dans des endroits aussi barbants que cette salle de bal.

Il avait levé les yeux au ciel tout en parlant. Très peu de temps après, Leukos avait été conduit hors de la scène par un homme en noir, et Shäan s'était séparée des deux borgnes, laissant au plus grand la tâche de ramener le plus jeune à Koniake. Eliott se tourna vers Zeï, l'air toujours sûr de lui.

-T'inquiètes pas, hein. Je peux me débrouiller seul ! Je vais le retrouver et arrêter de t'embêter !

Et sur ces mots, le jeune garçon se mit à boiter en direction de la sortie. Il ne voulait surtout pas être un poids pour Zeï. Cela dit, il n'avait pas non plus envie de retrouver le soigneur. Il se glissa dans les couloirs aussi discrètement que sa prothèse le lui permettait et finit par arriver à proximité de la fontaine. Où il entendit un plouf. Curieux, il y boita et y découvrit Leukos, ayant revêtit son habit de triton. L'enfant haussa un sourcil.

-Pourquoi tu barbotes dans la fontaine ? Tu peux pas rester hors de l'eau longtemps ?

-Heh ?

C'est tout ce qui put sortir de la bouche de Déholia face aux questions de la dame qu'elle menaçait, puisque avant qu'elle ne puisse dire quoique ce soit d'autre, Shäan déboula dans les toilettes. Trop surprise pour réagir, Déholia desserra son étreinte. Elle ne grogna qu'à peine quand Shäan la força à se courber en guise d'excuse. Et elle se laissa tirer de la même manière dans les jardins.

Son esprit et son corps ne se réactivèrent qu'au moment où les réprimandes de Shäan l'assaillirent et que la brise fraîche caressa son visage. Déholia serra les dents et les mains.

-J'en ai rien à branler de qui elle est ! Elle a dit le nom d'mini-Stratus ! C'est une gamine de Jangala, j'devais faire la nounou pour cette peste, mais elle s'est fait kidnapper par un groupe de tocard. Quand j'ai entendu cette meuf dire son nom, comme ça d'un coup, j'ai vrillée. J'suis un soldat, quand y a un problème, j'agis, m'dame.

Elle tira son bras vers elle pour se détacher de la brune. Le regard brillant de frustration.

-T'façon, j'me casse. C'pas pour moi ces conneries mondaines.

Sur ces mots, elle remonta dans la salle pour prévenir ses camarades qu'elle partait, piquer une bouteille et redescendre aussi sec pour s'enfoncer dans les rues de Sahl. Le tout en arrachant et jetant le haut de sa tenue aux pieds des marches de la salle du bal.

Hyrmina avait beau avoir l’habitude des soirées mondaines, voir une telle foule lui fit un choc. Gens de tous âges et de toutes classes sociales se côtoyaient dans un brouhaha certains. Les plus pauvres restaient néanmoins davantage près des buffets que la noblesse qui se contentait, le plus souvent, de se délecter d’un verre de champagne tout en dégustant un petit four raffiné d’autant plus intéressant qu’il avait dû coûter une fortune. A vrai dire, les plats, aussi appétissants soient-ils, intéressaient peu la jeune demoiselle. Si elle avait prévu de se régaler ce soir-là, c’était avant tout les yeux et, peut-être, si l’occasion s’en présentait, l’esprit. Ainsi, à peine avait-elle posé un pied dans la somptueuse salle de réception que le rôle qu’elle jouait lors de chaque réception lui revint de façon instinctive. Il s’agissait pour elle d’une sorte de seconde nature, acquise au fil des ans, et elle se glissa avec grâce au milieu des invités.

Mais tandis qu’elle s’émerveillait des parures extravagantes et recherchées que croisait son regard, quelqu’un la bouscula. Elle n’avait ressenti qu’une légère pression sur son bras, rien de grave. Sa robe en revanche s’était froissée. Elle la remit en place d’un geste rapide et précis avant de lever les yeux sur la coupable qui s’excusait déjà. Hyrmina ne s’était pas un instant départie de son sourire aussi tendre que mystérieux ; elle savait bien comme les soirées de ce genre pouvaient être riches en imprévus et que savoir garder son calme et sa sérénité était en ce cas un atout non négligeable, faire des éclats n’étant jamais de bon ton.

- N’ayez crainte, tout va bien. Il est courant que ce genre d’incident arrive. Vous cherchez quelqu’un ?

Tout en parlant, elle analysait mentalement cette inconnue qui lui faisait face. Elle ne l’avait jamais rencontrée auparavant, ou du moins elle n’avait aucun souvenir d’elle. Et pourtant, elle avait une physique mémorable ! Au-delà de sa beauté évidente due à ses traits harmonieux que sa robe luxueuse mettait en valeur, elle possédait une peau d’un blanc légèrement grisé et une chevelure de neige. De toute évidence, elle n’était pas humaine. Peut-être une Aelle ? Ou bien, plus probablement, une Styrge blanche… Mais que faisait-elle donc à Sahl ? S’il y avait bien une race peu acceptée dans le pays, c’était celle-ci.

Hyrmina n’eut pas le temps de se préoccuper davantage de la jeune femme, un jeune homme —son cavalier ?— répondit à sa place. Vêtu d’un costume en queue de pie il détonnait par rapport à la jeune femme. Ses cheveux étaient pour le moins colorés et plusieurs bijoux agrémentaient ses doigts. La demoiselle désapprouva intérieurement le manque de finesse et de sobriété de sa tenue sans qu’aucun de ses traits ne trahisse son jugement négatif.
Ainsi donc ils étaient à la recherche d’un « jeune protégé ». Hyrmina en déduit qu’il devait s’agir d’un enfant. Heureusement pour eux, les enfants étaient plutôt rares dans la salle. A moins qu’il ne s’agisse d’un Ael au physique adulte, il se démarquerait aisément du reste de la foule. Encore fallait-il le repérer, et les gens de petite taille avaient une certaine tendance à se fondre dans la masse.

- Puis-je vous aider ? A quoi ressemble votre jeune protégé ?

La jeune demoiselle avait la conviction qu’il serait plus intéressant de suivre ces deux personnes ressemblant peu aux habitués des bals qu’elle avait coutume fréquenter plutôt que de s’embarrasser de discussions mondaines d’un ennui profond. Sa mère semblait d’ailleurs l’avoir oubliée, c’était le moment parfait pour s’éclipser…

Les festivités battaient leur plein depuis plus de quatre heures maintenant. Les musiciens et orchestres s'enchaînaient sur la scène, accompagnés ou non de chanteur. La salle ne désemplissait pas, mais ce n’était pas toujours les mêmes hommes et femmes qu'on y trouvait. Les buffets et boissons étaient réapprovisionnés en permanences et des domestiques circulaient avec des plateaux de mignardises et coupes de champagne offert aux invités. Un cri perça soudain les discours mondains et autres joyeusetés qui composaient la soirée. Des gardes se précipitèrent alors vers son origine, dans le hall principal, et les nobles de Sahl ainsi que la populace et les étrangers furent écartés.

Bientôt, des rumeurs circulèrent au milieu de la foule. Le buste du Roi Henry Edgemont, une statuette d'or offerte au dirigeant pour l'occasion, avait disparu. Les grandes portes de l'entrée furent bien vite fermées, et les hommes chargés d'encadrer la soirée commencèrent à fouiller les invités en les dirigeants vers la sortie. Cela prit bien une heure de faire sortir tout ce monde, et il fallut user de diplomatie et de délicatesse pour ne pas froisser l'ego des plus célèbre en leur demandant d'ouvrir vestes et pochettes. Malheureusement, une fois le manoir vidé, la statuette n'avait toujours pas été retrouvée.

L'estrade désertée et la salle vide furent laissés en l'état tandis qu'on prévenait les autorités locales. Il fallait la retrouver, et le plus vite serait le mieux. Si le Roi l'apprenait, des têtes allaient tomber, c'était certain. Personne n'avait envie d'en arriver là.

Au-dehors, les nobles s'invitaient les uns chez les autres pour finir la soirée, encore choqués qu'un tel acte ai pu avoir lieu juste à côté d'eux. Les autres se donnaient rendez-vous dans des tavernes ou auberge pour continuer de boire. Les voyageurs, venus découvrir la fête, furent dirigés vers des auberges dans les quartiers bas de la capitale par les gardes qui géraient les calèches et fiacres venus chercher les plus riches.

C'était officiel, la fête était finie.

Le poing de Shäan se serra tandis que de son autre main, elle relâchait légèrement la pression sur le poignet de Déholia. Son regard foudroyait littéralement la jeune Croc quand elle lui lança froidement :

- Si tu tiens à garder ta place et à honorer la mémoire de ceux qui t'ont précédé et te font confiance pour mener à bien cette mission, tu devrais réfléchir avant de bondir sur n'importe qui. Il y a agir et s'emporter ! Tu aurais pu simplement lui parler avant de t'acharner sur elle de la sorte ! Tu sais bien comment sont…

Elle n'eut pas le temps de finir que la blonde s'arracha à son emprise et s'éloigna après avoir protesté contre la situation. Soupirant, la dame repoussa les quelques mèches de cheveux qui s'étaient échappés de sa coiffure impeccable avant de reprendre le chemin de la grande salle de bal. L'ambiance y battait toujours son plein, mais le cœur de la Jañgalienne n'y était plus. Après avoir fait un tour d'horizon elle décida de se diriger vers des verres de cocktails aux couleurs vives et d'en vider un cul-sec.

Cette histoire lui laissait un goût amer, elle aurait voulu pouvoir s'expliquer d'avantage avec son ancienne élève, mais celle-ci était bien connue pour avoir le sang chaud. Elle trouverait bien moyen de la rejoindre plus tard, ou le lendemain, pour rediscuter de tout cela, tranquillement, devant un verre, ou durant un échange de bons procédés. Un cri attira soudainement son attention et la dame cessa d'errer sans but entre les différents groupes pour en chercher la provenance. Au fond d'elle-même, Shäan espérait que ce n'était pas Déholia qui faisait encore des siennes, agressant un serviteur pour partir avec quelques bouteilles, par exemple…

Les rumeurs s'amplifièrent très rapidement et la dame n'eut aucun mal à en saisir l'essentiel. Se rapprochant d'un garde alors que de nombreux invités quittaient déjà le pavillon avec précipitation, elle le questionna, sourcils froncés :

- Pouvez-vous m'expliquer ce qu'il se passe ?!

Le garde, désemparé, avoua ne pas être plus au courant qu'elle et lui demanda de patienter dans la file de sortie plutôt que de les déranger dans leur travail. Agacée, elle s'exécuta tout de même, retrouvant par la même occasion son cavalier un peu oublié. Une demi-heure plus tard, ils étaient dehors, et la dame en avait profité pour interroger son bienfaiteur sur ce qui venait de se produire. Elle apprit ainsi qu'un vol avait eu lieu et y vit l'occasion parfaite de proposer ses services. Après avoir été raccompagnée à l'auberge, elle se changea rapidement et fonça à la caserne la plus proche se porter volontaire dans les recherches du voleur. En sortant de la bâtisse, elle eut un grand sourire. Shäan savait exactement à qui proposer une telle aventure !

HRP : fini pour moi :serenade:

Emrys s'excusa après avoir bousculé la jeune femme aux cheveux verts, mais cette dernière ne sembla pas y prendre offense. Au contraire, elle se proposa même de venir en aide à Koniake, qui cherchait son petit protégé. Mais leur trio ne fut que de courte durée malheureusement, bientôt des cris retentirent depuis le hall principal, et dans la foulée les gardes invitèrent toutes les personnes présentes à quitter les lieux. La rumeur d'un vol odieux se répandit rapidement dans l'assemblée, et une boule d'angoisse grandit au creux de l'estomac de la blanche. Il fallait qu'elle retrouve son cavalier, ; et vite !

"C'est à regrets que je me dois de vous quitter, mon cher Koniake... Je dois retrouver Karl avant de me perdre dans cette cohue, et vous le petit Elliott ! J'espère vous recroiser très bientôt..."

Elle serra les doigts chauds du jeune homme dans les siens, avant de les lâcher dans un sourire triste. La Styrge aurait vraiment aimé passer plus de temps en sa compagnie, mais elle ne pouvait décemment pas abandonner son partenaire, qui se trouvait peut-être dans une posture délicate ! Elle adressa ensuite un signe de tête avec un sourire poli à la jeune noble couleur émeraude, puis s'esquiva pour prendre un bain de foule. Zei était grand, elle devrait voir sa tête dépasser de toute cette masse !

"Karl !"

En l'apercevant enfin, la jeune femme héla le brun d'une voix rendue plus aigüe que d'habitude par l'inquiétude. Se frayant un chemin jusqu'à lui, elle se retint de lui sauter au cou de soulagement, et se contenta d'enrouler son bras autour du sien. La foule environnante les forçait à se tenir très proche l'un de l'autre, aussi elle n'eut qu'à se pencher pour lui chuchoter à l'oreille.

"Bon sang, quand j'ai entendu parler de vol, j'ai eu tellement peur que ce soit toi ! Je crois qu'il est plus que temps de tirer notre révérence..."

Emrys ne savait pas ce qui avait été volé mais visiblement c'était un objet d'une certaine taille, étant donné qu'ils demandaient simplement aux messieurs de vider leurs poches et aux dames d'ouvrir leur sac. Pas de fouille au corps, ce qui l'arrangeait bien étant donné qu'elle cachait dans son corset quelques menus larcins... Auxquels s'ajoutèrent les prises de son partenaire également. Décidément, la blanche avait pris deux tailles de bonnet durant cette soirée !

Mais bien heureusement pour elle, ils sortirent sans encombre, après un temps relativement long et ennuyeux. La soirée n'avait pas été exactement lucrative, mais il valait tout de même mieux en rester là - les nobliaux seraient aux aguets maintenant que le cambriolage était sur toutes les lèvres ! La blanche et son compagnon retournèrent donc ensemble jusqu'à l'auberge où ils logeaient, se séparant pour regagner chacun leur chambre respective. Ils auraient tout le temps de partager leur maigre butin le lendemain matin ! Regagnant ses pénates, Emrys fut surprise d'y découvrir qu'un message des plus surprenants mais intéressants l'attendait...

Code by Joy

HRP : Je tire ma révérence !